Un exorciste reprend officiellement du service auprès du diocèse de Lugano

Tradition moyenâgeuse ou réponse aux nouveaux besoins de spiritualité? Entre foi et occultisme, la RSI s’est intéressée au retour de l’exorcisme. Une pratique en pleine renaissance, régulée par des cours universitaires, qui tente de faire peau neuve.
Le diocèse de Lugano a fraîchement nommé un nouvel exorciste officiel. Le poste était resté vacant depuis la mort de Don Sandro Vitalini le 5 mai 2020. L’information a surpris celles et ceux qui croyaient ces pratiques enterrées depuis le Moyen-Âge. Ou reléguées aux films d’horreur. Mais de nombreux fidèles se montrent également soulagés par la nouvelle.
Falò, une émission de la télévision publique tessinoise (RSI), a entrepris un voyage à la découverte d’un métier «modernisé» et réglementé par des cours universitaires obligatoires. Une résurgence qui répond à une demande croissante de personnes en difficulté et qui permettrait de lutter contre des pratiques jugées plus «occultes» ou «ésotériques» par l’Église catholique.
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«Il faut un exorciste, car le besoin est grand»
«Inévitablement, c’est un secteur qui doit être couvert par une présence compétente, calme, intelligente. Mais il en faut un, d’exorciste, car le besoin est grand», explique à RSI Don Willy Volonté, lui-même responsable de certains cas spécifiques d’exorcisme au Tessin. Ce sera maintenant au tour de Don Gabriele Diener d’assumer le rôle de Sandro Vitalini dans le diocèse de Lugano, mais seulement après avoir été formé à Rome.
Entre-temps et au cours de ces cinq dernières années, les fidèles tessinois devaient demander de l’aide au-delà de la frontière italo-suisse, où les diocèses les plus proches sont très bien organisés. À Côme, depuis un peu plus d’un mois, un service téléphonique est en place pour celles et ceux qui cherchent un exorciste. «Je peux dire que depuis que nous avons été médiatisés, en quelques jours, nous avons reçu plus de cent appels», rapporte un responsable, Don Marco Nogara.
Une habitante du Tessin a également appelé ce service. Au micro de RSI, elle révèle avoir eu «besoin d’un exorciste» car elle aurait «subi un maléfice d’une personne qui a vraiment donné son âme au démon et envoie des malédictions».
Sans les exorcistes, «les gens iraient chez les magiciens, chez les sorciers»
Don Ambrogio, prêtre à Milan, explique la renaissance de l’exorcisme catholique au micro de RSI. «Je suis vraiment content d’être exorciste parce que sinon vers qui ces gens iraient-ils? Ils iraient chez les magiciens! Ils iraient chez les sorciers!» En redéveloppant l’exorcisme, l’Église catholique se positionne face à l’expansion des phénomènes de l’occultisme et du New Age. Le Saint-Siège espère par la même occasion endiguer la prolifération de guérisseurs, médiums et rebouteux.
Le prêtre milanais est considéré comme un maître dans ce qui est maintenant reconnu par l’Église catholique comme un métier à part entière. Une formation universitaire à Rome est même aujourd’hui requise. Les exorcistes sont aussi réunis dans une association internationale, officiellement reconnue par le pape François lui-même. Elle ne compte pas moins de 900 membres.
Un «dialogue» avec la science existe
Le dialogue avec la science existe, tiennent à préciser les prêtres, qui n’interviendraient qu’après ou en parallèle de la médecine, de la psychiatrie et de la psychologie. Une thérapie «complémentaire» à la médecine et pas «alternative», donc. Et le psychiatre tessinois Carlo Calanchini confirme en ce sens qu’il ne craint pas tant l’exorcisme. «Je crains davantage les charlatans, ils sont plus dangereux», explique-t-il. Selon lui, les charlatans, contrairement aux exorcistes modernes, détournent les patients de prescriptions médicamenteuses ou de traitements basés sur des preuves scientifiques.
En revanche, là où le diable semble ne plus exister, c’est au nord des Alpes. Dans la culture germanophone, les diocèses semblent maintenant renoncer à la pratique de l’exorcisme. À Saint-Gall, par exemple, le clergé répond autrement aux demandes des fidèles, avec une équipe d’experts de tous les domaines, religieux, médical et social.
Mais côté romand, il existe le service de délivrance du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg, avec deux prêtres exorcistes. Et quatre autres prêtres exorcistes rien que pour le diocèse de Sion, dont trois en bas-Valais.
Texte adapté de l’italien par Julien Furrer (RTS)/dbu

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